"Je n'ai pas vécu la liberté, mais je l'ai écrite sur les murs" (la révolution syrienne)

L’islamophobie, pathologie aigüe de l’insécurité culturelle.

in Chroniques de la violence brune/islamophobie/Religions/Révolution by

Supposons que le signifiant d’« islamophobie » ait quelques pertinences. Si « islamophobie » il y a, alors définissons ce terme selon son étymologie, c’est-à-dire comme une peur, une haine ou un dégout de la religion musulmane. D’une peur, d’une haine ou d’un dégout absolument légitime et non-condamnable pour peu que ce rejet respecte le cadre légal de la jurisprudence consacrée. En ce sens, force est de constater que depuis plus de vingt-ans, règne un climat d’idées et d’affects que l’on peut aisément qualifier d’« islamophobe » et ce, particulièrement dans le champ politique, médiatique et intellectuel[1], alimenté par différents acteurs – pas nécessairement majoritaires mais ayant assurément force de proposition et en ce sens, jouissant d’un relatif pouvoir d’influence –, formant ainsi ce que Pierre Bourdieu appellerait une « humeur idéologique »[2]. Pour notre part, nous pensons que l’« islamophobie » relève d’une phobie avant tout idéologique et culturelle, qu’elle procède d’un contexte historico-politique particulier fait d’insécurités et d’angoisses existentielles profondes, favorisant ainsi la sécrétion de toutes sortes de fantasmes et de psychoses dont les extrêmes et les contraires s’en nourrissent jusqu’à satiété – et ce, particulièrement chez une certaine élite intellectuelle et politique.   Une phobie idéologique Contrairement à une relative interprétation dominante, il nous apparait que l’« islamophobie » n’est ni un « racisme », ni une « religiophobie » ; elle est dans le pire et le plus vulgaire des cas, une xénophobie – au sens d’une altérisation/démonisation de l’Autre –, mais ne saurait s’y réduire et en constituer l’essence. L’« islamophobie » est  avant tout une phobie idéologique qui interprète tendanciellement toute pratique d’extériorité sociale…

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Pardon Wajdi, pour ces occupations

in Mémoires Vives by

C’était un 20 mai 2021, un mois de mai où le ménage de printemps s’imposait. Aérer, ouvrir, ré-ouvrir, en finir avec cette odeur de Covid, avec ces histoires de luttes, de combats sociaux, de convergences. Les théâtres étaient prêts, les artistes trépignaient. Il restait toutefois quelques intermittents dans les lieux, qui avaient décidé d’occuper des théâtres vides durant le confinement et d’y faire résonner les revendications qui agitaient l’époque, d’organiser les luttes, de rêver convergence. Plus de 100 théâtres furent “occupés” et des Agoras organisées partout en France devant ces théâtres avec une revendication : annulation de la réforme assurance chômage. C’était une bien belle et bien valeureuse lutte, promise à l’échec comme toutes les luttes du moment, qui méritait d’être saluée, encouragée, applaudit. Wajdi Mouawad, auteur prodigue du théâtre contemporain et directeur d’un théâtre national à Paris, le théâtre de la Colline publie un manifeste à l’attention du public de son théâtre, pour leur expliquer pourquoi il refuse d’ouvrir le théâtre et pourquoi il préfère annuler les représentations afin qu’ils n’aient pas le désagrément de croiser quelques militants dans le hall. Voici ma réponse d’occupante de ces théâtres, militante, artiste, intermittente ou pour reprendre la définition qu’il fait de nous: une sorte de bactérie humaine, d’infection de ce monde. Pardon Wajdi. Pardon, je suis coupable, je suis une grande coupable Wajdi. Je ne t’ai pas donné un grand et beau spectacle, à toi, oh maître des lieux…. pardon, j’ai beaucoup pêché Wajdi. Tu vois, j’ai moi aussi un faible…

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Une réponse à Aïssam Ait-Yahya: mon Frère, appelle-moi Marianne

in Ecole/islamophobie/Laïcité/Non classé by

Donc un jour un « salafiste » a toqué à ma porte, et ce fut toi. Je ne sais si ce mot te convient, je mets les guillemets, et tu ne me peux plus me soupçonner de vision policière. Car je t’ai ouvert, tu t’es assis sur mon canapé d’assimilée soumise, laïque et néo-sioniste, et puis tu as parlé. Trente pages, 45 minutes de lecture, une conférence d’une heure à peu près, sans être interrompu. Ce n’est pas l’envie qui m’en manquait, ni celle de te foutre à la porte et de la claquer derrière . Mais à quoi bon, Aïssam ? Je ne suis pas charcutière de Tourcoing, je suis une petite précaire démocrate insignifiante, sauf si elle refuse de se cacher derrière Gérald. A quoi bon te faire ce qui t’a déjà été fait, fiché S, perquisitionné, mis au ban de tes propres communautés. Salaf, donc, les seuls réac de France qu’on ne voit pas sur les plateaux télé. Non j’ai préféré saisir ma chance. Enfin l’un d’entre vous venait me parler. Oui, me parler, certes tu réponds à un homme, mais chez moi. Et toutes ces années, j’avais tellement de choses à te dire, mon Frère ennemi, mais contrairement à d’autres, je savais que cela ne servait à rien de parler dans le vide. Je vis dans une cité avec des hommes comme toi, et je sais comment vous êtes. Les racontars islamophobes me font bien rire, non vous ne frappez pas les apostates, les métèques, les buveuses d’alcool aux…

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La controverse Substack et Le modèle économique de la Gauche Raciste, Vol.1

in Médias etc. by

La pensée réactionnaire française et la gauche raciste tricolore, est obsédée par l’invasion de théories “venues des Etats Unis”. Des théories du genre, de l’antiracisme, du multiculturalisme, tout cela viendrait des campus universitaires américains, s’infiltrerait dans nos universités par le biais des islamo-gauchistes et détruirait insidieusement la France. Ces croyances sur l’américanisation sont assez commodes pour la gauche raciste, les souverainistes et les réactionnaires anti-antiracistes et autres obsédés du complot Woke. Celà permet d’expliquer comment font les Arabes pour affaiblir la grande Nation de France alors qu’ils sont clairement des inférieurs civilisationnels aux yeux de la gauche raciste, privés de laïcité et d’universalisme: ils sont aidés en fait par les campus américains. On peut aussi renouer avec les vieux mythes antisémites d’une cinquième colonne actionnée depuis l’étranger. On peut même comme certains souverainistes, recycler le fond de pot sur l’Empire contre la Nation. Tout cela est très commode mais c’est aussi une réaction à une réalité : le mouvement anti-raciste américain est celui qui a permis, par ses luttes acharnées, et au prix de morts, de se débarrasser de Donald Trump qui était l’avant garde du fascisme réactionnaire dans le monde. La résistance américaine au fascisme, incarnée dans le mouvement Black Lives Matter, est quelque chose qui a inspiré outre Atlantique et que l’on a envie d’imiter. Et ce phénomène d’émulation inquiète en France les tenants de la ligne de la gauche raciste, souverainiste et Printemps Républicain modéré ou radicaux, convaincus que « la gauche doit parler aux électeurs de Trump et…

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Qui est séparatiste ? Entretien avec Zinedine Gaid, professeur de philosophie, MHS Paris

in Antisémitisme/Ecole/Entretiens/islamophobie/Religions by

Zinedine Gaid est enseignant en philosophie. Il travaillait auprès des élèves du collège/lycée MHS, établissement parisien privé universaliste, acceptant le port des signes religieux. L’établissement a été fermé le 23 novembre pour “raisons administratives”, et présenté par les autorités comme un repaire de dangereux séparatistes. Lorsque je lui ai proposé cet entretien, je ne savais pas s’il accepterait dans la situation extrêmement difficile qui est la sienne, peu propice à la réflexion intellectuelle. Et je ne m’attendais certes pas à recevoir un travail de cette ampleur, pour lequel je le remercie infiniment . Bien loin des débats empoisonnés, grossiers et absurdes qui font le miel des polémistes en ce moment, on trouvera ici le récit d’une persécution, mais aussi et surtout l’affirmation d’une pensée libre qui se refuse au cadre défini par la persécution. Si vous souhaitez soutenir le projet MHS, mais aussi ses élèves et ses salariés, vous pouvez les contacter sur leur page Facebook, où vous trouverez leur parole à toutes et tous. Zinedine Gaid écrit également sur les sujets abordés ici sur le site Mizane.info ______________________________________ Nadia Meziane: D’abord où en êtes-vous, concrètement, après la fermeture définitive de votre établissement, en tant que communauté éducative ? Question très terre à terre, mais vous avez vécu une offensive répressive, idéologique, vous avez été, en tant que professeurs et élèves attaqués publiquement. Et du jour au lendemain, vous vous êtes retrouvés sans travail et pour les élèves, sans collège ni lycée. Votre directrice est interdite d’exercer et doit payer une…

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Day of the Rope au Capitole: le jour où le mythe néo-nazi a pris corps

in Chroniques de la violence brune by

Dans toute politique réussie, il y a une part de magie. Au sens de pratique magique, de rituels irrationnels et normalement inopérants mais qui vont avoir des effets dans le réel parce que la croyance en eux est suffisamment importante dans un corps social pour que les acteurs s’y conforment. Ce qui s’est passé au Capitole relève du Récit qui s’est incarné parce qu’il était suffisamment puissant et même dans les esprits de ceux qui le combattaient. De manière bassement rationnelle, ce qui s’est produit relevait normalement de l’impossible. Il ne s’agissait pas, en effet, d’une tentative de coup d’État. Un coup d’État se prépare dans l’ombre, en secret. L’attaque du Capitole a eu comme dirigeant apparent, un homme qui l’annonçait tranquillement depuis des semaines. Un coup d’État nécessite de petites unités clandestines armées qui choisissent des objectifs stratégiques clés et les prennent d’assaut le moment venu, en comptant sur la stupéfaction de leurs opposants, et pas seulement sur le soutien de la masse de leurs partisans. Depuis des semaines, des milliers et des milliers de suprémacistes blancs, d’accélérationnistes en tous genres, de Républicains pro-Trump clamaient que le 6 janvier serait la date du grand affrontement avec la démocratie américaine (1). Il y avait partout des appels, des hashtag, des cars et des voyages organisés pour l’insurrection qui vient et même des goodies, des casquettes et des sweat-shirts ornés d’un «  Civil War-6th January » fabriqués et commandés d’avance. Sans la magie politique, de celle qui envoûte le camp d’en…

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Le rôle des plateformes dans le fascisme d’intérêt public

in Médias etc. by

Non le PDG de Twitter n’a pas décidé seul de supprimer le compte du président US. Non les plateformes ne sont pas en détention d’un monopole d’un service public et non, la suppression d’un compte n’est ni une censure, ni la régulation unilatérale du débat public. Ce qui vient d’arriver avec la suppression du compte Twitter de Donald Trump suite aux émeutes du Capitole est l’aboutissement d’un processus long et complexe, et d’une révolution dans la politique de modération des plateformes qui a pu avoir lieu dans le contexte de l’épidémie de Covid et grâce au mouvement antiraciste de Black Live Matters et des solidarités qu’il a engendré dans la société. Petit retour en arrière D’abord il faut se souvenir de pourquoi Trump était sur Twitter. Trump était sur Twitter afin de contourner l’organisation démocratique normale, ses régulations et ses contre-pouvoir, notamment les médias. Trump n’a eu de cesse d’insulter, menacer et mépriser les journalistes qui lui posaient des questions ou faisaient des enquêtes. Pour ce faire il a pu recourir à un outil qui est Twitter et grâce auquel il pouvait, en très peu de mots, dicter une politique sans avoir à s’en expliquer, ni en conférence de presse (qui étaient passées à insulter les journalistes) ni face à une opposition politique, ni face à sa propre administration. C’est ça que permettait Twitter, une parole en nombre de mots ultra réduits passé directement du leader charismatique au “peuple” sans aucun intermédiaire, limitation ou contrôle. Twitter de son côté, ainsi…

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Bourgoin, le True Crime et l’Extrême droite

in Chroniques de la violence brune/Féminisme/Médias etc. by

  Un peu de contexte Soyons honnêtes, j’ai toujours eu un problème avec Stéphane Bourgoin. Comme n’importe quelle personne francophone qui s’intéresse aux tueurs en série, j’ai beaucoup croisé les écrits de Bourgoin qui est considéré comme le plus grand spécialiste français sur le sujet. Pourtant, je n’ai jamais aimé le lire tant il me semblait visible que Bourgoin manquait de profondeur dans son approche du sujet, ressassait et simplifiait ce qu’il lisait lui-même ailleurs et surtout laissait une grande place dans ses livres à des descriptions morbides qui me semblaient superflues et voyeuristes. J’étais également irrité de voir quelqu’un que je percevais (pourtant sans preuves à l’époque) comme un pseudo-spécialiste avoir autant d’audience pour diffuser des idées poussiéreuses et simplistes sur la psychologie humaine. Je m’inquiétais de son influence, et pour cause, Bourgoin a toujours été invité sur les plus grands plateaux télé, dans les plus importants journaux et ses livres (une cinquantaine) sont lus par des millions de lecteurs. Un autre fait, plus récent et qui alimentait ma méfiance, est que Stéphane Bourgoin a commencé à être édité chez Ring en 2013 (et nommé directeur de deux collections chez eux “Murder Ballads” et “Train de nuit”). Ring est une maison d’édition que l’on pourrait qualifier d’extrême droite (bien qu’elle s’en défende), et pourtant Bourgoin ne semblait pas avoir de problème moral à être édité aux côtés d’auteurs tels qu’Obertone, Marsault, Geoffroy Lejeune, Alexandre Mendel, ou Papacito. Edit: suite aux révélations sur Bourgoin, Ring s’est empressé de dire à…

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#metoo #maispaspourtouTEs

in Féminisme by

Aujourd’hui, je voudrais parler de mes doutes sur #MeToo. Alors je transpire un peu, j’ai l’impression que je devrais me fendre d’un disclaimer, dire que je suis féministe et que oui #MeToo c’est important. Et ça déjà, ça m’interroge, d’avoir ce réflexe de me défendre : #MeToo c’est un peu sacré, on n’y touche pas. Mais moi j’ai plein de questions, de doutes, et un peu de colère, aussi. Allons-y, un peu en vrac.

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La guerre d’Assad est la continuation de la solution politique par d’autres moyens

in Révolution by

La guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens. C’est grâce à cette définition de Clausewitz que l’on peut répondre à tous les partisans d’une « solution politique » en Syrie, que l’offensive actuelle du régime d’Assad et de ses alliés n’est rien d’autre que la continuation de la “solution politique” par d’autres moyens. Cette posture, en opposant solution politique et solution militaire laisse croire qu’il y aurait une séparation claire et nette et mythique entre guerre et paix. Une façon pour les « réalistes » de constituer leur réalité alternative, une « solution politique » dont on ne sait pas grand chose si ce n’est qu’elle serait l’exact inverse de la situation actuelle. Cette inversion stricte entre les deux états permet ainsi aux « réalistes » d’en appeler à leur fameuse solution politique sans jamais identifier dans le réel le point où se rejoindraient les « solutions militaires » et la « solution politique » et qui permettrait de comprendre comment passer de l’un à l’autre. Or il n’en est rien, les frontières entre guerre et paix sont de plus en plus brouillées pour le meilleur mais aussi pour le pire et le cas de la Syrie est exemplaire à ce titre. Le droit de la guerre s’étend, il y a de plus en plus de zones de désescalade, de cessez le feu, de zones tampons, de négociations pour l’accès des ONG, de couverture médiatique, tout ceci étant des logiques de « paix », de droit des civils qui viennent réguler les logiques de guerre. Mais le brouillage des frontières produit…

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