Ni post-sociétale, ni social-démocrate : Le PS comme symptôme d’une gauche anti-populaire et hors sol

Alors que les analyses sur le naufrage de la gauche française et européenne s’accumulent, entre aggiornamento conservateur et progressisme d’apparat, le fossé avec les classes populaires n’a jamais été aussi profond. Le dernier rapport de la Fondation Jean-Jaurès, qui promeut une “troisième gauche, post-sociétale”, et la tribune de Chloé Ridel en réaction, qui tente d’en sauver “l’honneur”, en sont les symptômes : deux réponses en apparence opposées, mais qui s’enferment dans les mêmes impasses. Derrière leurs différences de strict vocabulaire, elles reconduisent toutes deux un cadre technocratique, centralisé, souvent aveugle à ses propres biais — notamment ce suprématisme occidental qui persiste à désigner les normes dominantes comme neutres, et les identités subalternes comme problèmes à intégrer. Dans une période où la méfiance envers le politique atteint un niveau historique, en particulier chez les minorités les plus exposées aux injustices, ces approches ne font qu’alimenter le désaveu. Quelques ajustements idéologiques n’y changent grand-chose. Peut-on encore croire que la gauche pourra se reconstruire sans remettre en cause ses propres angles morts, sans affronter la défiance dont elle est l’objet, et sans se défaire de sa prétention à incarner à elle seule – par ses think-tank, “ses personnalités”, et ses appareils – le progrès, quel qu’il soit ? Face à ces impasses, il ne s’agit plus d’attendre des partis, mais de peser sur eux. Ce sont les expériences collectives, les solidarités concrètes et l’autonomie des mouvements sociaux qui peuvent dessiner un horizon qui rime avec autre chose qu’un énième échec. Bien plus que…