"Je n'ai pas vécu la liberté, mais je l'ai écrite sur les murs" (la révolution syrienne)

Fermer les librairies, asphyxier les cerveaux : un nouveau chapitre de la dystopie islamophobe.

in islamophobie by

« Il fallait le faire ». C’est la phrase par laquelle Jean-Jacques Bourdin introduit avec un ton admiratif l’épopée présumée courageuse d’un journaliste de l’Express sur Sud Radio. Celui-ci ne revient pas de Gaza sous les bombes. Il a simplement pris le métro et le RER pour visiter deux librairies musulmanes, à Aubervilliers et à Argenteuil. L’épopée a consisté à pousser la porte de deux commerces en accès libre, à feuilleter les livres, à parler avec quelques clients puis à rentrer chez lui. On peut lui accorder qu’en cette période de travaux liés aux J0 sur le réseau de transports en commun, le voyage ait pu être fastidieux, nous l’éprouvons tous les matins en allant travailler. A part cela, la phrase de Jean Jacques Bourdin relève de la mise en scène obligatoire du séparatisme présumé des musulmans lorsqu’il s’agit de réprimer. Une pure inversion accusatoire qui fonctionne socialement. En écoutant Sud Radio, toute personne non musulmane et éloignée de la communauté en déduira qu’il est interdit et dangereux d’entrer dans une librairie islamique (1). Elle n’ira donc jamais pousser la porte et restera persuadée que ce sont les musulmans qui créent cette situation. La réalité est évidemment toute autre et inversée, c’est la peur d’entrer en contact avec les musulmans qui génère leur isolement dans la société française et permet leur persécution. Depuis plusieurs semaines, en effet, aux attaques contre les écoles, collèges et lycées musulmans, à celles contre les mouvements de solidarité avec la Palestine, s’ajoutent désormais celles contre…

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Solidarité inconditionnelle avec Urgence Palestine.

in A la une/Prises de positions by

Un génocide ne peut advenir par la seule force militaire. Ce qui permet sa réalisation, c’est l’assentiment actif, assumé ou non, de forces sociales et politiques massives, notamment par la neutralisation et la disqualification des forces qui cherchent à être solidaires des victimes. Ce rappel préliminaire est nécessaire dans le contexte français actuel, lorsqu’il s’agit de débattre d’une tribune contre Urgence Palestine, le collectif unitaire sans lequel il n’y aurait tout simplement pas de mobilisation pour la Palestine. Ses membres fondateurs sont ceux qui ont été là dès le 8 octobre, dans le cadre d’une répression massive visant à empêcher toute mobilisation même minimale. Si Urgence Palestine est la tête du mouvement, c’est parce qu’il est le mouvement tout entier, son émanation naturelle. La concentration de toutes les énergies, les anciennes et les nouvelles. Quiconque a engagé son corps ailleurs que sur les réseaux sociaux le sait, parce qu’il a tout simplement obéi à ce sentiment d’urgence absolue qui a suivi les déclarations ouvertement génocidaires de Netanyahu et de son gouvernement. Il n’y aucun moyen d’attaquer Urgence Palestine sans attaquer la solidarité contre le génocide. Au moment où celui-ci s’intensifie, au moment où l’armée israélienne massacre à Rafah ceux à qui elle a ordonné de s’y rendre s’ils ne voulaient pas mourir, il n’y a aucun hasard dans la publication d’une tribune qui demande en réalité aux gens de ne plus se mobiliser pour la Palestine, en boycottant le collectif unitaire qui mène la mobilisation avec l’assentiment de tous et…

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Missak au Temple des Âmes Vides.

in A la une/Mémoires Vives by

Quand j’erre dans les rues d’une métropole, Toutes les misères, tous les dénuements Lamentation et révolte l’une à l’autre. Mes yeux les rassemblent, mon âme les loge Je les mêle ainsi à ma souffrance intime Préparant avec les poisons de la haine, Un âcre sérum-cet autre sang qui coule, Par tous les vaisseaux de ma chair de mon âme.   La dernière fois que je me suis récité ce poème de Missak, qui est un camarade, alors je l’appelle par son prénom, c’était le jour de l’enterrement de Nahel. Comme nos frères sont  tous de dangereux barbares, même le jour de leurs funérailles, on met la ville sous cloche, comme si elle retenait son souffle devant nos fureurs incompréhensibles, comme si même les larmes pour les morts étaient des fleuves d’acide. Il n’y avait plus de bus à Nanterre, il fallait marcher de la Défense jusqu’au cimetière, de longues côtes interminables et ces pancartes qui indiquaient le Mont Valérien. Et l’ombre de Missak avec soi pour accompagner celle de Nahel. Missak, immigré rageur au visage taillé à la serpe, que les Français trouvent beau seulement maintenant. Il avait une tête de basané, Missak, pourtant. En ce temps-là, ça valait bien une barbe, cette tête-là. Dans les années 30, les gens convenables devaient frissonner devant son regard noir sous des sourcils épais lorsqu’il errait les poings serrés en rédigeant intérieurement des tracts incendiaires. Ce sont ces  mêmes honnêtes gens qui se presseront au Panthéon cette semaine pour le caresser comme un…

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Les Métamorphosés

in A la une/islamophobie/Révolution by

L’islamophobie française offre à la communauté musulmane d’innombrables occasions de lutter. Entrave systématique, obsessionnelle, elle ne cesse de se dresser sur le chemin de notre bonheur. Impossible d’avancer bien longtemps sans découvrir son nouveau défi. Sans surprise, le discours de politique générale de Gabriel Attal et la commémoration des victimes du 7 octobre par Emmanuel Macron ont initié une séquence politique préliminaire à l’adoption de la prochaine loi islamophobe. Sans jamais faire référence au “séparatisme” ou “à l’islam radical” mais à travers l’invocation de la “barbarie” et de la lutte contre le “terrorisme”, l’insidieuse rhétorique étatique continue de nous cibler. Rappelons ce qui fût sous-entendu. La dissolution de l’identité française et les violences gratuites mises en avant par Attal et Macron – concepts d’extrême droite désormais consensuels – se font aux mains d’une barbarie musulmane contre laquelle il est urgent de se réarmer. En refusant de nous nommer directement, le couple exécutif ne nie pas la centralité du combat islamophobe: il démontre l’évidence de sa pertinence et de sa nécessité. L’esprit de cette rhétorique est celui d’une martialité assumée attendant sa prochaine attaque. En refusant l’insistance abusive, les deux têtes de l’hydre islamophobe rappellent que le prochain coup ne sera pas porté immédiatement. C’est plutôt lors du crépuscule du mandat d’Emmanuel Macron que la prochaine loi islamophobe sera adoptée, lorsqu’il faudra gonfler la légitimité d’un extrême-centre candidat à sa propre succession. Sève du suprémacisme islamophobe, l’anxiété anticipatrice circule dans les veines étatiques, nourrissant une persécution préventive à la brutalité croissante.…

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Minuit dans le siècle de Guantanamo

in A la une/islamophobie by

Il se joue ces dernières années un étrange combat à Guantanamo. Un combat pour la culture. L’administration d’état américaine tente en effet d’empêcher les détenus libérés d’emmener avec eux leurs productions artistiques. Elle y met un acharnement particulier  ( 1) Il n’y a rien dans ces œuvres qui dévoile un quelconque secret sur ce qui a été fait aux détenus de Guantanamo. La clarté des évènements qui s’y sont déroulés est aussi vive que l’orange choisi pour les uniformes des détenus. Le monde entier sait déjà que là-bas, armés d’une légitimité idéologique décrétée incontestable, on a violé tous les principes de droit qui avaient été proclamés par les Lumières, et la légalité la plus élémentaire. Tout le monde sait l’enfermement sans procès, la torture physique et psychologique et même que Guantanamo n’était que la Bastille, et que l’on y a ajouté les oubliettes, nécessaire complément, pire que le pire, les centres secrets de torture et de disparition programmée installés dans des pays tiers, ces centres où l’on n’avait même plus le dernier droit, faire savoir sa propre mort à sa famille et à ses proches. Alors pourquoi ce combat qui semble une vengeance d’arrière-garde, un enjeu absolument dérisoire à côté de tout cela : empêcher des hommes d’emmener avec eux l’activité et la créativité développée pendant une vie en cage, faite au prix d’efforts incroyables. Pourquoi pas juste un « Vazy casse-toi », de celui que les gardiens disent aux détenus libérables des prisons normales, un « Prend tes pauvres…

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Demande de promulgation d’un décret Twitter de dissolution des éditions Gallimard

in Prises de positions by

Demande solennelle et circonstanciée pour la  dissolution des éditions Gallimard et affiliés. Suite aux annonces de dissolution du ministre de l’intérieur, concernant notamment les éditions Nawa, et après avoir  soigneusement étudié les arguments publiés par le décret Twitter du  29 septembre 2021, ainsi que ceux développés lors de la dissolution du CCIF et affiliés divers et variés, en vertu de l’article 1 de la déclaration des droits de l’homme (à laquelle renvoie le préambule de la constitution de 1958, à valeur constitutionnelle supérieure aux décrets Twitter jusqu’à nouvel ordre) lequel pose notamment l’égalité des citoyens devant la loi, nous demandons par la présente, et par analogie universaliste, la dissolution des éditions Gallimard et attendons une réponse urgente du Conseil des Ministres et surtout du Community Manager du Ministre de l’Intérieur sur Twitter. Il est reproché aux associations dissoutes d’entretenir des liens étroits avec les tenants d’un islamisme radical, d’être en lien avec des personnes tenant des propos relativisant ou légitimant le terrorisme, de susciter des commentaires hostiles aux autres croyances sans apporter aucune modération, de ne pas avoir pris de distance ni ne s’être désolidarisé avec tout un tas de gens compromettants. Considérant tout d’abord que Gallimard était en contact étroit avec son éditeur et membre du comité de lecture Richard Millet, celui-ci ayant de son propre aveu, participé  à des actes de violences et de guerre aux côtés de milices chrétiennes au Liban. Que le dit Richard Millet a consacré un ouvrage entier à l’apologie  du terroriste Andres Breivik dans…

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« Vous connaissez Michéa ? » : quelques rappels fondamentaux à propos de l’idéologie du site Ragemag – Ragemag Episode 1

in Chroniques du déni/Médias etc. by

À la veille d’une élection présidentielle marquée par l’affirmation de thématiques électorales issues de la droite identitaire, l’antifascisme en France ne peut plus se contenter de réagir par-à-coups, tant les déclarations nauséabondes et les actes violents se multiplient. Pour comprendre comment nous en sommes arrivés là, il n’est pas concevable de se contenter d’explications simplistes, mais il est possible de faire des focus sur notre passé récent pour envisager la manière dont certaines idées que l’on pensait remisées au placard de l’Histoire ont pu revenir sur le devant de la scène politique. Pour cela, il faut se placer sur le champ de la bataille des idées, pour bien observer d’où les coups de surin sont venus, à l’intérieur de la gauche elle-même. L’étude du cas du magazine Ragemag (2012-2014), site web aussi éphémère qu’orwellien, donne un éclairage intéressant sur l’entrée d’idées conservatrices et réactionnaires dans le champ progressiste, à une époque où la gauche française connaissait une crise sans précédent sous l’influence conjuguée des médias alternatifs d’internet et de la galaxie soralo-dieudonniste, dans une séquence politique particulière qui peut rétrospectivement être qualifiée d’acmé du « populisme de gauche ». Débuts du web 2.0 et renouveau du « ni droite/ni gauche » L’étude de l’évolution des idéologies et des propagandes ne devrait jamais être déconnectée de celle de leurs principaux vecteurs, des moyens techniques permettant la percée de nouvelles pensées. Comme il a fallu s’intéresser à la radio pour comprendre les années 1930 ou à la télévision pour les années 1980, il faut absolument se…

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Facebook supprime les comptes d’une jeune journaliste et résistante afghane en exil pour un post contre Daesh

in Prises de positions by

English version below Shabnam Salahshoor Herawi a 23 ans. Étudiante en sciences politiques, journaliste dans un média d’Herat, sa ville natale, activiste des droits humains, elle a fui à Kaboul pendant l’avancée des talibans. Lorsque ceux-ci ont envahi la capitale, elle est restée cachée dans un hôtel, tout en refusant de se taire sur les réseaux sociaux. Des semaines durant, elle a continué à défier le pouvoir taliban à visage découvert malgré le danger imminent et les menaces, en exigeant que les droits des femmes soient respectés, en communiquant sur la répression qui s’abattait sur les journalistes. Elle était à Abbey Gate à l’aéroport de Kaboul le 26 août 2021 lorsque Daech a frappé. Malgré le choc, elle a filmé les scènes terribles après l’attentat, comme elle a filmé les talibans qui frappaient des femmes devant ce même aéroport. Elle a continué à faire son travail d’information. Cependant, elle n’a pas pu s’échapper fin août. C’est seulement ce samedi 9 octobre, après un mois et demi de résistance sur place, qu’elle a pu enfin arriver en France, suite à des actions collectives et au soutien qu’elle a rencontré notamment en communiquant sur les réseaux sociaux avec des européens et européennes. Son premier statut public après son arrivée rendait hommage à la mémoire des victimes de l’attentat de la mosquée de Kunduz, attentat revendiqué par Daech. Et c’est ce statut qui a déclenché la suppression de son compte par Facebook, de son compte Messenger et de son compte Instagram. Nous ignorons…

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Vaccinée, troisième dose de solidarité offensive à la rentrée.

in Instants by

Cher gouvernement Vos insultes sous couvert de féliciter les vaccinés, ça commence à me fatiguer. Pas d’amalgame s’il vous plaît, j’ai pris le Pfizer, pas la carte d’En Marche, la France qui travaille pour vous, ce sera sans moi. Je me suis pas vaccinée pour retourner bosser pour huit balles de l’heure et une amende à 135 balles si je rentre trop tard et que j’avais pas d’attestation pour l’apéro dinatoire d’En Marche. Je suis vaccinée pour le Chaos vivant contre votre Ordre qui sent la Mort. Je suis vaccinée pour ne contaminer personne dans les manifs. Je suis vaccinée pour protéger les chômeurs quand on manifestera contre la réforme de l’assurance chômage Je suis vaccinée pour protéger les retraités quand on manifestera contre la réforme des retraites. Je suis vaccinée pour protéger les amis en situation de handicap quand on manifestera pour l’individualisation de l’AAH , et puis des AESH pour les gosses. Je suis vaccinée pour retourner occuper les théâtres et cette fois on sortira pas avant d’en avoir fini avec la société du Spectacle. J’aime pas spécialement Debord, mais encore moins Marlène Schiappa en train de réciter du Maurras chez Hanouna. Je suis vaccinée pour pas tomber malade pile le jour où je fais grève et rater la manif. Je suis vaccinée pour dire Même pas mal au flic qui m’arrachera mon masque dans une de vos nasses. Je suis vaccinée pour manifester pour que les exilés puissent se faire vacciner. Et avoir des papiers et un…

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” Le complotisme est d’abord une cosmogonie, une parole mythique sur la naissance du monde”, entretien avec Sylvie Taussig

in Entretiens by &

Le “conspirationnisme” est sans doute l’un des objets politiques les plus étudiés et débattus du moment pandémique. Comme tout objet politique, il est en partie défini de manière subjective par celles et ceux qui l’étudient tandis que sa définition est en grande partie rejetée par ceux qui sont définis comme tels. L’originalité de l’essai de Sylvie Taussig réside sans doute beaucoup dans une tentative d’explication du phénomène  qui ne cache pas son lien profond avec la subjectivité de l’autrice. Chercheuse, c’est à partir de ses sujets de recherche antérieurs qu’elle a réfléchi sur les conspirationnismes. En l’occurrence, la gnose, cette quête de transcendance intérieure face au Mal originel du monde, transcendance, qui cependant, ne peut passer que par l’Initiation à la Vérité par la médiation de celui ou de ceux qui savent. Ce point de départ situé aboutit à une réflexion passionnante, sans doute parce qu’elle évite deux écueils: le mépris politique et la déshistoricisation vis à vis des conspirationnistes. Bien qu’extrêmement dur politiquement dans le jugement sur ces courants, son essai tente une filiation et une réinscription dans l’histoire des idées et des passions philosophiques  politiques et religieuses de l’Occident, et sort l’analyse du surplomb militant visant à voir les conspirationnistes comme des pions manipulés par une idéologie totalement étrangère à ce qui peut animer bien d’autres engagements ” respectables”. Surtout de Kant à Descartes en passant par une modération radicalement optimiste dans la recherche du Bien et de la Vérité, quête en partie illusoire et en partie constitutive…

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