"Je n'ai pas vécu la liberté, mais je l'ai écrite sur les murs" (la révolution syrienne)

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Palestine

Brouillards de guerres, nous avons aimé le Liban

in Instants by

Bizarre d’attendre encore une guerre déjà commencée. Il y a déjà des dizaines de morts au Sud-Liban dans les rangs du Hezbollah, des pertes qui n’ont jamais été aussi importantes depuis 2006 (mais sont négligeables par rapport aux pertes ensuite en Syrie, qui ont peut-être durablement bougé les seuils de tolérance). Déjà des militaires, déjà des morts, déjà des milliers de déplacés, et déjà des morts familiers et proches, notamment en la personne d’un journaliste dont tout le monde avait au minimum une connaissance indirecte, celle d’un visage familier dans un certain Beyrouth – et pourtant pas encore une guerre qui se dit. Dans cette période où les confrontations en cours ont déjà duré plus longtemps que la guerre de 1967 ou celle de 1973, et désormais plus que 2006 bientôt, règne un flou bizarre. Savoir la violence et la guerre déjà là sur le sol libanais et pour une fois sentir que ce n’est pas un événement, pas du dicible, juste un fond de roulement, est une situation inédite dans un pays où tout s’écrit d’habitude par surgissements soudains. C’est aussi d’une tristesse sans nom par rapport à l’histoire du sud-Liban, terre tellement marquée par la guerre (invasion en 1978, 1982, occupation jusqu’en 2000, guerre en 2006), que des dizaines morts ou des bombardements quotidiens n’y sont même plus un événement national, mais presque quelque chose qui relèverait d’une presse régionale si elle existait dans le pays, ou bien d’un bulletin interne d’une organisation, celle du Hezbollah, dont les…

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Hamas, le point aveugle

in islamophobie by

En exil aux USA, Souhail Chichah enseigne au Williams College. Ses recherches actuelles portent sur la théorie du capital, l’anthropologie de la blanchité ainsi que sur la généalogie du racisme. Son poème intitulé “Prendre langue” a été nominé par le concours européen d’écriture “Parler l’Europe en des langues différentes”. L’une de ses publications récentes, intitulée “ ’L’islamisation de la France’ : acteurs et ressorts d’une dangereuse rengaine”, co-écrite avec François Burgat, vient d’être publiée par la revue Jadaliyya. L’analyse, par la sociologue Nouria Ouali (Université Libre de Bruxelles), du “traitement d’exception” réservé à Souhail Chichah”révèle le processus de criminalisation et de diabolisation” ainsi que “la violence institutionnelle, politique, intellectuelle et médiatique sans précédent” en Belgique, dont il a fait l’objet. Il a également été la cible “de réactions politiques unanimes et musclées allant de la condamnation morale aux intimidations politico-judiciaires et à l’éviction” de son emploi de chercheur à l’Université Libre de Bruxelles. “J’ai cherché non pas à rire des actions humaines, ni à pleurer à leur sujet, ni à les haïr, mais à les comprendre.” – Spinoza L’attaque militaire menée par le Hamas est actuellement le cadrage “occidental” dominant de la question israélo-palestinienne. Le Président des États-Unis a présenté ses condoléances aux familles israéliennes qui ont subi des pertes, tout en négligeant ostensiblement d’exprimer des sentiments similaires aux familles palestiniennes, et ce en plein bombardement aérien intensif de Gaza. Parallèlement, les États-Unis ont envoyé des moyens militaires navals et aériens dans la région, démontrant une fois de plus leur…

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Paris: poule mouillée pour #Gaza, un 28 octobre où la Seine était moche.

in Mémoires Vives by

Trois heures du matin . Impossible de dormir, chercher sans arrêt si des comptes Palestiniens ont posté quelque chose depuis la coupure d’internet. Insensé 29 octobre, être rassuré par quelques vidéos de bombardements. Ca veut dire que des gens sont encore vivants. Qui étaient les manifestants à Paris ? Des gens qui n’avaient pas dormi hier aussi et fouillé l’horreur du silence soudain. Il ne restait plus que cela en France, pour savoir quelque chose, au moins entendre des voix palestiniennes dans le brouillard médiatique infâme. Il n’y a plus rien, juste nous solidaires des fantômes que nous savons encore vivants. Trois heures du matin, on ne peut pas dormir, on a vécu dix jours en un, l’adrénaline ne redescend pas . La cruauté mesquine du pouvoi, la manifestation autorisée de dimanche dernier et puis de nouveau l’interdiction de pleurer en public hier. Je me souviens des mots d’un père venu avec sa femme, et ses deux filles, ce dimanche là. Il disait que la famille avait attendu patiemment que les manifestations soient autorisées,car ils voulaient venir tous ensemble. Il était souriant, les enfants aussi, il était paisible, il expliquait pourquoi lutter pour l’indépendance de la Palestine est important, il avait emmèné ses filles en Cisjordanie l’an dernier et puis au rassemblement autorisé pour leur apprendre la solidarité et la justice. Je pense à toutes les jeunes filles de ce dimanche là, leurs rires “ Filme pas, ma mère ne sait pas que je suis là, elle va s’inquiéter” ,…

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La mort probable des intellectuels arabes

in Révolution by

Le chef d’un État arabe et socialiste – probablement Saddam Hussein – se rend dans un village pauvre de son pays. Il en réunit les habitants et demande, du ton compatissant du père de la nation, qu’ils lui présentent leurs doléances. Nul n’ose prendre la parole sauf Hassan, qui crie le coût du pain et la sécheresse de la terre, la matraque du gendarme et la corruption des potentats féodaux. Ému, le chef d’État écrase une larme et remercie celui qui parmi ses enfants a eu le courage de la vérité. Un an plus tard, le chef d’État retourne au village. La scène est rejouée mais personne ne répond plus à la question paternelle. Tout juste entend-on l’un dire d’une voix faible et mal assurée : « tout va bien dans le meilleur des mondes, mais où est mon ami Hassan ?¹ ». *** Sherine Abu Akl est morte assassinée – probablement ciblée par un sniper de l’armée israélienne. Elle était l’une des plus fameuses journalistes palestiniennes et arabes : sa voix – et sa célèbre signature : Sherine Abu Akl, al-Jazeera, Ramallah – avait accompagné des générations de locuteurs arabophones. Jeune reporter durant la seconde intifada, elle n’avait eu de cesse lors des vingt années suivantes de documenter la colonisation de la Cisjordanie. *** On rappellera, à raison, que Sherine Abu Akl n’est guère la première journaliste arabe que l’on assassine – tant s’en faut. En Syrie, Bachar al-Assad revendique l’élimination physique des intellectuels (Bassel Shahada, Khaled al-Issa, Razan…

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