"Je n'ai pas vécu la liberté, mais je l'ai écrite sur les murs" (la révolution syrienne)

Author

Sonia

Sonia has 9 articles published.

Sonia
Que le sentiment de l'étrangeté nous ouvre à l'égalité, que l'expérience de la solitude, qui est à la fois intime et sociale, nous donne l'envie du collectif

Bribes de voix, celle d’une précaire étrangère pas assez polie, parmi tant d’autres

in Instants by

Il y a quelques temps, j’ai été contactée en urgence par une mère isolée qui avait été régularisée quelques mois auparavant. Un fils de 8 ans, enceinte de 6 mois. Une grossesse non désirée, mais elle s’en est rendue compte trop tard pour avorter, et puis le père, bien que très précaire lui aussi et sans papiers, voulait garder le bébé. « Même dans une situation précaire, on peut fonder une famille » lui a-t-il dit. C’est une petite fille, a-t-elle précisé en me l’annonçant. Il m’a semblé que cela avait un sens particulier pour elle, en tout cas, cela en a eu pour moi. Juste ce mot fille, et il y a comme un lien, une communauté. Entre femmes, il y a des moments où on peut se dire des choses intimes sans tabou, et peut-être d’autant plus facilement qu’il n’y a pas de relations personnelles. Les relations avec les mecs, comment se passent les rapports sexuels, les avortements qu’on a faits ou pas, les libertés qu’ils nous restent à conquérir, le désir d’autonomie.   Elle appelait parce que suite à une rupture de prise en charge par le 115 (samu social), qui l’avait déjà baladé dans des hôtels d’un bout à l’autre du département, c’était le conseil départemental qui payait l’hôtel et la prise en charge s’arrêtait. Alors elle s’est installée dans les locaux des services sociaux et elle ne voulait pas bouger. J’aurais voulu aller sur place. J’aurais voulu une réaction collective en urgence. Je n’avais personne autour de…

Lire la suite

L’extrême droite chez Daimler en Allemagne

in Chroniques de la violence brune by &

Oliver Hilburger est un salarié de longue date des usines Daimler de la région de Stuttgart (environ 22 000 salariés sans compter les intérimaires), sur le site d’Untertürkheim. L’histoire de cette entreprise automobile n’est pas sans lien avec le nazisme. À partir de 1937, Daimler-Benz produit de plus en plus de matériel d’armement notamment pour la Marine, le Heer et la Luftwaffe. En 1944 la moitié des 63.610 travailleurs à Daimler-Benz est soit travailleur forcé, prisonnier de guerre ou prisonniers KZ (camps de concentration).

Lire la suite

On the difference between clogging an artery and creating a heart

in Other Languages by &

It is significant that, all of a sudden, one remembers there that Arab springs happened in 2011. But using this recollection to legitimize the French Yellow Vest movement, is showing a misunderstanding of these two movements, which remain very different despite formal similarities. These comparisons are not made for the glory of the Arab Spring, but rather to reinforce another comparison, the one with the French Revolution. Well, but the French Revolution it is far, so one will use the Arab Spring for making the connection. What is interesting however, is that by highlighting everything that opposes the Yellow Vests and the Arab Springs, one can highlight how the Yellow Vests is remote from a revolution.

Lire la suite

De la différence entre boucher une artère et créer un cœur

in Révolution by &

C’est significatif que tout d’un coup, on se souvienne ici qu’il y a eu des printemps arabes en 2011. Mais quand c’est pour légitimer le mouvement des gilets jaunes en France, c’est montrer une incompréhension de ces deux mouvements, très différents malgré des similitudes formelles. Ces comparaisons ne sont pas là pour la gloire du printemps arabe mais plutôt pour appuyer une autre comparaison, avec la révolution française. Mais bon la révolution française c’est loin alors on va chercher les printemps arabes pour faire le lien. Ce qui est intéressant c’est qu’en faisant ressortir tout ce qui oppose les gilets jaunes et les printemps arabes on peut faire ressortir à quel point ce mouvement est éloigné d’une révolution. La revendication d’une similitude avec le printemps arabe n’est d’ailleurs pas nouvelle. Le tristement célèbre « printemps républicain » a déjà innové en la matière, tentant de récupérer l’image positive du printemps arabe (en enlevant le mot « Arabe ») pour en faire une mouvance raciste. De la même manière les homophobes du « printemps français » tentaient eux aussi de s’approprier et bien évidemment d’oblitérer la dignité retrouvée des printemps arabes en l’identifiant à une fierté nationale aux relents racistes. Une similitude qui est pointée, c’est que dans les deux cas, ce sont des mouvements populaires “spontanés”. Les printemps arabes se sont produits dans des régimes autoritaires au mieux, clairement dictatoriaux le plus souvent. Il n’y avait donc guère d’organisations auxquelles adhérer librement, même s’il y avait des différences entre la Tunisie et la Libye ou…

Lire la suite

Ligne rouge et gilets jaunes

in Chroniques du déni by &

A quoi a ressemblé le 17 novembre des gilets jaunes ? A rien de social, à rien de démocratique, à rien de collectif, à rien d’émancipateur… Le 17 novembre a été une journée de libération de ressentiments, d’aigreurs, de haine des minorités, de refus de la prise en compte de la parole et des contraintes du reste de la population, de nationalisme, tout ce qui va avec la culture d’extrême-droite dont ce mouvement est imprégné jusqu’à la moelle puisque c’est dans ce cadre idéologique-là qu’il a émergé. Des incidents “isolés” qui mettent en lumière le fond de violence contre les minorités du mouvement des gilets jaunes Le type d’initiatives menées par les gilets jaunes est révélateur : faire chier. Peu importe qui en fait, puisqu’il n’y a pas de nous, qu’il n’y a pas cette démarche de voir au-delà de son intérêt personnel. Donc on bloque surtout ses voisins, en fait. Et dans une ambiance qui permet de se lâcher. On recense une agression homophobe à à Bourg en Bresse, une autre islamophobe envers une femmes voilée à St Quentin. A Tours, un véhicule a été repeint en bleu blanc rouge et porte les slogans suivants « français d’abord, migrants dehors » et « force honneur patrie. » A Charleville Mézières, un des leaders des gilets jaunes locaux montre clairement son orientation antisémite et homophobe sur sa page facebook. On annonce des opération péage gratuit, mais dans le sens où il faut prendre le ticket d’entrée sur l’autoroute, pas dans le sens où on doit…

Lire la suite

Alors le 17, on n’y va ou pas ?

in Chroniques du déni by

En dehors de cette orthographe, c’est la question que bien des gens de gauche se posent. Le 17 novembre est une mobilisation d’extrême-droite. Pas seulement parce que le Front National et Debout la France soutiennent. Pas seulement parce que bon nombre des promoteurs et organisateurs sont d’extrême droite. Comment une pétition qui stagnait à quelques centaines de signatures a-t-elle soudainement pris une telle ampleur ? Qui a les meilleurs réseaux sur internet depuis des années, au point d’avoir son nom, la fachosphère ?

Lire la suite

Plan social et réactions paradoxales: des salariéEs, des luttes et des syndicats

in Mémoires Vives/Traces by

Ile de France, fin des années 2000, dans un site de 300 personnes d’une petite entreprise qui en compte 3 en France, environ un millier de salariés en tout. L’activité, c’est de la sous-traitance pour de grands groupes. Salariat jeune, mixte, pas mal d’immigrés qualifiés, d’Afrique et du Maghreb, des 2ème ou 3ème génération comme on dit (ce qui est à la fois une assignation et un élément qui pèse). Bref, des Blancs, des Noirs, des Arabes, et pas mal de turn over. Donc des sessions de recrutement fréquentes. Dans l’une d’elle, Myriam, une précaire qui a déjà une expérience militante et se syndique très vite. Un changement d’horaires suscite un grand mécontentement chez les collègues, mais c’est un site qui ne s’est pas mobilisé depuis très longtemps, personne n’a jamais fait grève, les syndicats n’informaient guère de ce qui se passait en réunion. La section syndicale fait un premier courrier, pas de réponse. Le syndicat lance une pétition (qui permet via les échanges de nouvelles adhésions), toujours rien. Les syndiquéEs décident de faire une heure de grève et distribuent un tract pour l’annoncer plus largement. La direction propose une réunion pour en parler, justement le même jour et à la même heure que le débrayage prévu. Bon, pas de souci, la décision est prise de suspendre le débrayage, de toute façon si ça ne donne rien il est facile de relancer l’idée quand on veut. Le service planification réétudie la question des horaires, et apporte des modifications. Tout ce…

Lire la suite

Déclics et des gens

in Instants by

Première conversation. Un militant, salarié d’un établissement du secteur public où ça bouge quand même un peu, explique que s’il devait reprendre le boulot à plein temps, il rentrerait très vite dans la gueule de tout le monde, à commencer par ses collègues parce qu’il n’en peut plus des gens résignés et par les encadrants, le premier qui vient lui dire quoi que ce soit, il va être bien reçu. Deuxième conversation. Une militante explique que dans un magasin où elle va régulièrement et où sa sœur est employée, elle a récemment discuté avec un salarié, qui lui dit être chef de rayon, gérer l’approvisionnement, les autres salariés du rayon et précise, sachant l’engagement syndical de son interlocutrice, qu’il est contre les syndicats dans le magasin. Malgré cette sortie provocatrice, la conversation se poursuit sur les conditions de travail de l’une et l’autre. Le chef de rayon en vient à donner son salaire : 1500€. La militante syndicale lui dit alors gagner bien plus, sans « responsabilités » d’encadrant, simplement en remplissant des chariots, parce qu’elle est dans un secteur où il y a (encore) une bonne convention collective. Quelques jours plus tard, la sœur de la militante syndicale lui dit que le chef de tel rayon voudrait lui parler, sur des questions de salaire, sur la future mise en place du CSE…   Les exemples viennent du milieu syndical, mais les deux démarches pourraient se retrouver dans d’autres cadres militants. Ce n’est pas une question d’étiquette, les deux militants sont du même…

Lire la suite

J’aime pas les manifs. Enfin, si, mais ça dépend

in Instants by

Ma première manif, c’était un 1er mai, dans une ville de province, de taille moyenne, en France, il y a une vingtaine d’années. Je découvrais le militantisme, mais je n’étais dans aucune organisation. J’avais dessiné au marqueur un A cerclé sur mon sac. Le capitalisme, depuis les cours au collège sur le XIXème siècle, c’était clair pour moi que c’était un système à combattre. Mais  le communisme, ça m’évoquait du gris, des gens obligés d’être tous pareils et d’aller à l’usine ou au bureau faire un boulot qu’ils n’aimaient pas forcément. L’anarchisme (où ai-je bien pu tomber sur ce mot, je ne sais plus), pour moi, c’était le collectif sans nier l’individu. Et donc, ce 1er mai-là, c’est la première fois que j’ai expérimenté le nous, ce sentiment d’être avec d’autres, d’être ensemble même si on ne se connaissait pas, de partager un but, une envie de changer les choses. Je ne connaissais aucune chanson révolutionnaire, mais je crois bien que j’ai chanté quand même. Peu de temps après, je me suis retrouvée à Paris. Il y avait le mouvement des sans-papiers, depuis un an ou deux déjà. Je garde le souvenir de manifs joyeuses, parce que c’était dur (à quel point, je ne m’en rendais pas compte encore). Des manifs importantes, avec beaucoup de Français qui manifestaient leur solidarité. C’était la période des luttes des « sans » (je n’aime pas cette qualification, car c’était des mouvements qui avaient beaucoup à dire et à montrer), avec le mouvement des chômeurs de…

Lire la suite

Go to Top